Croatia Trophy 2013… en BJ42
Le plan était de construire un Toyota fait de différents modèles. Chassis/suspension KZJ, essieux BJ7 heavy duty, motorisé par un 3Bturbo (le 13BT des pauvres) couplé à une boite 5 et carrossé BJ40. Toutes les pièces du puzzle étant en attente de montage dans l’atelier une série d’évènements viendra bousculer notre calendrier. Quand je reviens du ski fin février, rien n’est fait.
Constat, il nous reste 5 semaines. Impossible pour les amateurs que nous sommes de monter le puzzle en ce laps de temps. Passons au plan B donc, à savoir mon BJ42 que j’utilise presque chaque jour quand je vais nourrir le bétail. Quoique, restons sérieux… un BJ42 avec son 3B de 90 chevaux pour courir le Croatia Trophy, fût-ce en classe Adventure? Faut être fou.
La majorité de mes amis me rappelant que je le suis (fou), je décide donc d’y aller avec le BJ42 moyennant un grand entretien et quelques adaptations afin de courir le CT. Vu qu’il roule chaque jour tout devrait être en ordre. Il y a juste la boite de transfert à vérifier. J’ai remarqué qu’en montant une cote en TT, je perd parfois toute traction de l’essieu avant. A contrôler donc.
Je compte utiliser le 3Bturbo de feu mon BJ70, vétéran entre autres de 6 Transilvania Adventure Trophy’s et 3 Istra Challenges, le coupler à la boite 4 du 42, l’embrayage renforcé Exedy étant toujours en bon état. Suffit de changer les supports moteur, enfin c’est ce que je pense. L’essieu avant recevra le nez de pont équipé ARB du BJ70 et les arbres de roue et joints cinétiques Longfield, bien plus solides que les originaux, selon le fabricant ça égale le fameux Dana 60 comme solidité, pas rien ça. L’essieu arrière sera remplacé par un exemplaire full floating normalement prévu pour un glissement limité et équipé d’un nez de pont ARB que j’ai récupéré sur un HZJ73. Le freinage sera soigné également avec de nouveaux étriers à l’avant. Les batteries seront remplacées par des exemplaires plus adaptés au treuillage. Le montage d’un treuil sera nécessaire et si j’arrive à les faire passer, les pneus seront mes vieux Superswampers de 36 pouces. Pour finir le 42 recevra une nouvelle suspension et de nouveaux amortisseurs. Tiens, il me faudra un arceau aussi…
Vu le mauvais temps qui reigne dans notre petit pays et qu’il est hors de question de mécaniquer dehors avec des températures négatives, le vieux Landcruiser est transféré vers le magasin de Geolock, société de mon ami Gregg, où sont également stockés les pièces de mon puzzle initial. Gregg y travaille sur son proto chassis tubulaire. Donc endroit idéal même si c’est à 60 km de la maison.
Première étape, avec Gregg j’enlève le hardtop, les portières et les sièges à commande électrique. Vu mes horaires irréguliers, j’ai tout le temps de m’occuper du vieux BJ. La même semaine je vais à l’atelier pour vider l’essieu avant en vue du montage des Longfield et du nez de pont ARB et d’y monter de nouveaux bourrages. Le premier problème voit le jour. Coté conducteur aucun problème au démontage, coté court, pas moyen d’enlever le joint cinétique et l’arbre de roue. Bonne et mauvaise nouvelle. La boite de transfert n’a pas de problème, c’est les canelures du différentiel et/ou de l’arbre de roue qui sont en miettes. Problème supplémentaire, si je ne sais pas enlever l’arbre de roue, je ne sais pas enlever le nez de pont non plus ce qui veut dire que je dois trouver un nouveau corps d’essieu avant.
Un coup de téléphone plus tard je sais où je peux aller chercher le nouveau corps de pont. La semaine d’après, boulot oblige, je pars le chercher à 120 km de la maison, je parcours 120 km supplémentaires jusqu’à l’atelier et je commence à remonter tout sur le nouveau corps d’essieu après avoir passé 2 bonnes heures à le nettoyer. Nez de pont avec nouveau joint papier, je monte les bourrages, les swivels et quand je veux mettre les Longfield dedans… rien ne va plus. “Godverdoemme”comme on dit chez nous. J’appelle Marc, garagiste et magicien du Landcruiser où j’ai été chercher le corps d’essieu. S’avère que son fils qui a été prendre mon essieu dans le stock a malencontreusement pris le seul essieu BJ40 premier modèle qu’ils avaient en stock. Modèle ayant les joints cinétique moins gros et donc plus fragiles, ce pourquoi après Toyota est passé sur des cinétiques plus épais et un corps d’essieu adapté. Vu qu’à part les joints et les arbres tout est monté et que j’ai passé un temps fou à nettoyer l’intérieur de l’essieu avant de commencer le montage, Marc me dit de jeter l’essieu dans le coffre et de passer, qu’il arrangera ça. C’est reparti pour 120 km mais bon, en une demie heure l’affaire est dans la poche et je repars avec un essieu complet, monté comme il se doit. 120 km vers la maison. Ca me fait une journée de 480 kilomètres et 5 heures à l’atelier…
Qu’à celà ne tienne. J’y retourne le lendemain pour démonter le moteur, c’est à dire, déboulonner tout et défaire toutes les connections et tuyaux de façon à ce que Gregg et Fillip, quand ils ont un quart d’heure, puissent enlever le bloc avec le clarck, chose que je ne préfère pas faire seul.
Le surlendemain je pars aux Pays-Bas chercher la suspension Dobinson. Nulle part en Europe encore en stock sauf chez All American Import, grand spécialiste Toyota où il restait un jeu au fond du magasin. Les amortisseurs sont des Tough Dog, importés en exclusivité et gracieusement offert par Euro4x4Parts avec l’amortisseur de direction OME en prime. Merci Françoise.
Mon prochain passage à l’atelier je monte l’essieu avant avec les nouvelles lames et amortisseurs. Avec Gregg et Fillip ça va assez vite. Enfin une chose de faite.
Deux jours plus tard Gregg m’appelle, le bloc est déposé. Il me demande au passage si j’ai un support de boite de réserve car le caoutchouc de l’ancien est déchiré. Le lendemain je me couche en dessous du BJ42 et je me rend compte que le support de boite n’est pas vissé mais soudé (réparation de fortune probablement) et qu’il n’y a donc pas moyen de le remplacer sans déposer la boite. Quelques gros jurons plus tard la boite se trouve par terre et je démonte le support. Vu le prix prohibitif d’un support de boite neuf chez Toyota, faudra essayer de trouver ça d’occasion. Retour chez Marc donc, évidemment il y a plus d’un support pour ce genre de boite et il faut avoir le modèle. C’est reparti pour un marathon de 2 x 120 km mais non sans avoir mis le moteur dans la camionette aussi. Le bloc étant déposé, j’en avais profité pour changer le bourrage du villebrequin mais il me manque l’extracteur pour le roulement de sortie de boite… pas envie de le faire au burin donc je prend le 3B avec pour vite faire ça avec un extracteur sans risquer d’abimer quoi que ce soit et, du coup, en profiter pour mettre le nouvel embrayage avec la pièce ad hoc pour le centrer. J’avais aussi monté le collecteur de sortie avec le turbo sur le bloc issu du 42. Le plan initial était de mettre le 3Bturbo de l’orange dedans mais contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce n’est pas si facile que ça. Autre pompe à eau donc autre système de poulies, circuit d’eau différent, alternateur et démarreur différent, filtre à huile qui pend au lieu d’être orienté vers le haut, du coup pile à l’endroit du retour d’huile du turbo… bref, j’utiliserai le 3B du 42, Marc bricolera une entrée pour le retour d’huile du turbo vers le carter moteur.
Il me reste deux semaines. Marc me demande ce qu’il me reste à faire. Euh… pose moteur et boite sur le support qu’il m’a dégoté, changer l’essieu arrière pour le modèle full floating et y monter le nez de pont ARB, monter suspension et amortos arrière, pas oublier de changer le réservoir pour un modèle qui ne fuit pas, montage de treuil et faire l’électricité du treuil, installer le tripmaster, monter les pneus…
Marc m’arrète et me dit que mon moteur restera chez lui, que j’ai qu’à lui apporter le reste et qu’il me terminera mon puzzle. Il a gagné le Croatia Trophy deux fois et sait ce qu’il fait.
Nous sommes mardi. Vendredi je suis de retour avec le 42 sur le plateau, boite et essieu arrière ainsi que lames et amortos arrière dans la camionnette. Samedi soir un coup de téléphone de Michael, le fils de Marc. Mon Toy est prêt et a été testé. All systems go comme on dit. Ils ont même montés un vieil arceau qui trainait par là. Me reste qu’à le fixer. Le surlendemain je ramène le 42 à la maison. Il me reste une semaine, notre départ étant prévu mardi 30. Plus qu’assez de temps pour monter le trip, le treuil et les pneus et de fixer
l’arceau. Tiens, j’y pense, je n’ai pas de sièges. Un coup de téléphone plus tard et c’est arrangé. Chris, super pote et grand amateur de Landcruiser et de Peugeot 205 a encore 2 sièges de 205GTI dans son stock qu’il veut bien me filer. Gratos. Merci Chris.
Le lendemain Joeri passe pour effectuer quelques améliorations coté arceau et j’en profite pour installer les sièges. Pas le temps de bricoler, on les soude. Ma fille, qui a 12, ans s’occupe de boulonner l’arceau après que j’ai foré les trous nécessaires et installe les harnais. En passant elle me rappelle de ne pas trop endommager le BJ car elle voudrait s’en servir dès qu’elle aura son permis…
J’en prend bonne note. Etape suivante, monter les Swampers et adapter les garde-boue. Mon outil de choix, une disqueuse. De cette façon, pas besoin de body-lift pour faire passer les pneus de 36 pouces. En purgeant les freins, on en fait trop et nous tuons le maitre cylindre, plus de frein arrière du tout. Merde. Un échange standard nous couterait 220€… je préfère rouler sans freins dans ce cas. Mais Marc en a encore un bon qu’il veut bien nous sponsoriser, on passera par chez lui en partant et on montera là-bas.
Reste à monter le treuil. Je visse la platine de treuil sur les longerons du chassis et je boulonne le treuil dessus. J’ai opté pour mon bon vieux Winchmax de 17000 livres. Monstre de traction, lent mais ne ralentit pas , même si on treuille 2 voitures. J’ai fait 2 Transilvania Trophy avec et j’ai une confiance aveugle dans mon monstre orange. Je déroule le cable complètement pour y mettre la corde Dyneema et je remarque que le treuil est chaud. Pas possible. Après vérification il semble qu’il y ai un problème coté planétaire. Trop tard pour commander les pièces, dépose du Winchmax, je prendrai le Superwinch EP9000 qui est encore dans mes étagères. Le moteur est cramé mais j’appellerai Jim de Gigglepin pour qu’il m’emmene un BOW2 24v sur place. Coté planétaire, tambour, axe, engrenage… nom de @#µ%… manque un bout. Pas étonnant après 3 ans dans une étagère. J’appelle Gregg. Avant d’avoir posé la question il me dit que je peux aller chercher son 8274, suffira de monter le BOW2 24v dessus et d’y enrouler ma corde. Il m’apporte le treuil qu’il a disqué de l’épave de son Range classic… avec le bout de chassis sur lequel le support du treuil était soudé en prime. En disquant encore quelques bouts, on sait adapter le tout sur le Toyota, je roulerai donc avec un bout de chassis de Landrover sur mon Landcruiser… on aura tout vu.
Si c’est la dernière des mésaventures? Non, le trip ne fonctionne pas, manque une mini goupille dans l’engrenage. Soit, on empruntera ça sur place.
Pour couronner le tout, Gregg-le-photographe (à ne pas confondre avec Gregg-qui-m’a-offert-le-treuil) qui allait tracter le plateau avec son BJ45 a tué sa boite de transfert en faisant le zazou pendant son voyage au Maroc une semaine avant. Pas de véhicule tracteur donc. Allo Gregg (celui du treuil)… et voilà que je pars avec une Ford Transit de Geolock comme véhicule tracteur.
LA PREPARATION EN IMAGE
Parfois tout s’arrange et je ne veux pas trop savoir comment. Je remplis le Transit, on atèle le plateau avec le BJ et c’est parti. Il est 19 hrs , mardi 30 avril. Nous espérons arriver le 1er mai dans l’après midi.
Tudor, mon copilote arrivera par avion d’Antibes et nous rejoindra sur place. Il se démerdera pour arriver au camp, à 2 bonnes heures de l’aéroport, au beau milieu de nulle part. C’est tout à fait lui ça. Il sera d’ailleurs au camp avant nous, ayant fait connaissance de Ben, autre français qui vient voir le CT en touriste en vue d’une éventuelle participation en 2014.
Entretemps nous avançons bien, Gregg s’occupe de la musique (le Transit n’a pas de radio) et au beau milieu de la nuit je vois quelque-chose dans mon rétro qui ne devrait pas y être. Je m’arrète et je vérifie… le bikinitop est en miettes, complètement oublié de l’enlever pour le transport. Ca commence bien mais bon, il y a pire.
Nous arrivons comme prévu au milieu de l’après-midi
. Retrouvailles avec Tudor. C’est le boxon habituel. Décharger, retrouvailles avec des potes qu’on voit qu’une fois par an, monter le camp avec une bière en main… Nous nous installons comme prévu chez nos amis du Team Autrolls. Je connais Thierry depuis Transilvania 2008 lorsque son assistance a réparé l’irréparable sur mon Toy. Ca crée des liens. J’étais son copilote l’an passé sur son nouveau Patrol au CT2012 et cette année il roulera avec son fils Dylan. Il n’est pas encore arrivé mais son campement est installé, son assistance est là sous la haute tutelle de mon grand ami Lulu, fils cadet de Thierry et de Nathalie. Loic, qui a racheté le Patrol précédent est là également avec Pascal, son Co. Ils vont courir en classe Adventure comme nous.
Dès que nous sommes installés, inscription, apposer les autocollants des sponsors et vers Topusko, village voisin pour manger un bout. Nous trouvons un restaurant où ils servent des schnitzel accompagnés de frites et de bière. Ca fera l’affaire.
Le lendemain on prépare le BJ pour le prologue. Nous montons les Swampers et le treuil de Gregg. Avant d’aller se coucher la veille, j’étais passé au campement Gigglepin et j’avais récupéré le Bow2 que Jim m’avait ramené. Nous le montons sur le 8274 qui est en fait un GP car toutes les pièces ont été remplacés par du renforcé provenant de chez le spécialiste anglais en faisant ainsi un treuil autrement plus costaud que le 8274 d’origine. Problème, aucun de mes relais 24v fonctionnent. Grrrr. Retour chez Jim pour en dégoter un mais il n’ a que du 12v en stock. Pas grave, sur un véhicule 24v on trouve toujours du 12v, l’inverse est moins évident. Montage, chipotage, ça marche. Nous montons la corde et en l’enroulant le moteur ne tourne pas rond. Thierry, qu’est arrivé pendant la nuit, nous signale depuis sa tente de toit que le frein colle et qu’on doit le démonter. Problème, pas le temps, tout le monde se prépare pour le prologue. On a perdu trop de temps à essayer d’avoir assez de charge sur le circuit électrique pour encore savoir démonter et remonter. De plus les blocs ne fonctionnent pas encore. Heureusement que Adie, le mécano de l’équipe Moose Offroad, une bande de joyeux lurons venu d’Angleterre et que nous connaissons encore du Transilvania 2010 sait nous filer un sérieux coup de main pour brancher les blocs. Ben, notre nouvel ami français aide où il peut. Quand nous pensons être prêts pour le prologue mais dépourvu de treuil nous joignons le cortège vers le terrain/marécage où la corrida aura lieu. Une fois sur place nous constatons que les commandes des ARB ne fonctionnent plus. Donc pas de blocs ni de treuil. Ca va être dur le prologue comme ça.
Nous décidons d’aller voir le parcours avant de prendre une décision. Je me rappelle qu’en 2012 le prologue Adventure était une promenade de santé donc avec un peu de chance on s’en sortira. Vérification faite, le prologue Adventure de cette année est celui des Trophy de l’année passée. Nous donnons forfait. Pas la peine d’aller se planter dans un marécage sans treuil ni blocs. Nous préférons de loin ne pas abîmer la voiture et partir dernier le lendemain mais avec un véhicule en ordre. Nous devenons donc spectateurs. Le spectacle est assez fou comme d’habitude. Certains équipages ont l’adrénaline qui coule de leurs oreilles et roulent comme si c’était un demolition derby, levent le pied pour rien ni personne. Belles images pour les photographes et premiers abandons. Nous retournons au camp pendant cette folie et démontons le treuil, entretien complet, refection du frein renforcé. Seul hic, refermer le frein avec ses 21 billes et le remonter sans que ça parte en couille. Pas possible. Jusqu’à ce que je me rappelle que LE spécialiste du treuil, à savoir Jim doit avoir un outil spécial pour ça. Son bivouac est en face du notre, 5 minutes plus tard le frein est monté, le treuil tourne comme une horloge suisse et nous avons même réussi à réanimer la commande des ARB. Nous n’avons toujours pas de trip car même avec la pièce que Mario, mon pote allemand nous a trouvé, pour l’une ou l’autre raison, le truc refuse tout service. Tudor en fera son affaire demain.
Souper sous la tente de l’organisation et dodo.
Le lendemain premier roadbook. Enfin seul dans les bois et les marécages. Comprenne qui pourra mais nous ne partons pas dernier. Le 3B ronronne, Tudor trouve ses marques de suite, je me sens bien, c’est parti pour une semaine de septième ciel tout-terrain. Les indications du roadbook se suivent et je commence à avoir confiance dans les capacités tout-terrain de notre vieux BJ. Passage difficile, ça passe sans problèmes en bloquant l’arrière. A la difficulté suivante je veux bloquer les 2 ponts mais pour l’une ou l’autre raison les ARB refusent tout service. Bon, il n’y a pas 36 solutions, on s’y engage doucement, puis pied au plancher et à notre étonnement notre ancêtre se joue de la difficulté. Faut dire que les Swampers de 36, gonflés à 1.5 kilos pourtant, y sont pour quelque chose. Dans les « swamps » croates, les superswampers font honneur à leur nom. Incroyable comme un pneu peut améliorer les performances d’un véhicule. Sans blocages ça risque d’être sport mais bon, on a un treuil en pleine forme donc on passera, quoi qu’il arrive. Enfin… c’est ce qu’on pense. Après 12 km de pistes dans la forêt, premier embouteillage. Un chemin creux, très creux même, avec des traces profondes par lesquelles il faut passer obligatoirement car selon certains il y aurait un CP en haut. Les équipages qui sont passés sur les flancs redescendent et s’engouffrent dans la même trace. Quand c’est à nous, nous nous lançons dans les traces en sachant très bien qu’avec nos lames nous n’arriverons pas très loin. Effectivement, après 40 mètres nous sommes posés en bonne et due forme. Tudor sort le câble du treuil et escalade la paroi gauche pour trouver un point d’ancrage. Câble en place, je treuille, le treuil tourne, ralentit et… s’arrête. Je coupe le moteur (faute de débutant) et je vais voir ce qui se passe. Le moteur du treuil n’est pas chaud du tout, le câblage est en ordre… je retourne dans la voiture et quand je veux démarrer… plus rien… Un coup d’œil sur le voltmètre m’apprendra que les batteries sont complètement drainées. Mauvaise nouvelle ça. Non seulement on est planté pour un bon moment mais en plus l’alternateur ne charge plus. J’ai bien un alternateur de réserve mais il est resté dans mon garage à la maison avec les autres pièces de réserve que j’ai également oublié de prendre. Enfin, faut d’abord essayer de sortir d’ici. Pas facile sans moteur et sans treuil. On décide de laisser les batteries recharger un peu en espérant pouvoir ne fût ce que démarrer après une demi-heure. On n’ a même pas le temps d’essayer, Andjelko, architecte des roadbooks arrive à bord de son G avec Jasminka, le médecin comme copilote. Il nous sort en marche arrière des traces et nous demande ce qu’on compte faire. Nous lui expliquons notre problème et que nous trouvons plus prudent de rentrer. Il prend sa radio, s’entretient avec un collègue de l’organisation puis nous dit d’attendre 10 minutes et que quelqu’un d’autre viendra nous chercher pour nous ramener au camp.
Pas mal l’organisation. Ca nous change du Transilvania Adventure Trophy où ils estimaient qu’un équipage dont on était sans nouvelles depuis 2 jours avait simplement abandonné, s’était sorti des forêts toute seule et était reparti à la maison. Ici, la communication et le contrôle aux PC permettent de savoir quel véhicule est manquant et sur quel tronçon. Ils savent donc où aller chercher les équipages dont ils sont sans nouvelles. Assez rassurant leur système. Une petite heure plus tard nous sommes au camp, ramené par un autre G de l’organisation en cortège avec le mini-proto motorisé par un bloc de R1 et un autre véhicule dont l’essieu arrière dit merde au châssis.
Une fois sur place, Mario, allemand de son état et bon pote, vient aux nouvelles. Pour lui c’est fini, il a cassé la boite de son proto. Il veut savoir ce qui se passe et plonge sous le capot du landcruiser. Il lève la tête avec une drôle de grimasse et me demande ce que c’est que ce truc que Toyota a monté comme alternateur ? Je lui explique que c’est effectivement une merde puisque c’est une pièce originale de Daihatsu (Toyoda), qu’il a un régulateur extérieur et que la pompe à huile pour l’hydraulique est incorporé au truc. Pas moyen donc de remplacer cet exemplaire par un autre, il n’y a pas d’antiquaire japonsais dans le coin. Après vérification, il appert qu’effectivement l’alternateur donne zéro charge. Nous jouons dans une belle pièce. Je me rappelle que sur mon BJ70 nous avions mis du 24v en direct sur une des cosses de l’alternateur pour réveiller la charge. Système infaillible que nous avons utilisé pendant 3 ans sur le véhicule précédent. Nous dégotons un interrupteur et installons le câblage en déconnectant le régulateur comme sur le BJ70. Rien… Mario en perd son allemand mais pas sa bonne humeur. Il me regarde d’un air béat, rebranche le régulateur d’origine, lui envoie 24v dans les dents, prend le voltmètre et relève le tête avec le grand sourire qui lui est caractéristique. L’alternateur donne 26v au ralenti, en roulant bon train il va droit vers les 32 et en pleine charge de treuillage on est à 26v. On a même réussi à remettre le compresseur ARB en route, donc treuil et blocs en ordre. C’est Byzance…
Enfin, le temps se gâte, les autres équipages rentrent un à un, tracté par d’autres ou non. Beaucoup de dégâts. Avec la pluie qui rend les pistes ultra glissantes les carrosseries sont dans un sale état. Nous n’avons plus rien à faire sur notre voiture donc nous en profitons pour aller manger à l’aise avant que tout le monde ne soit rentré. Les repas sont comme d’habitude copieux, frais et à volonté. Le mauvais temps nous aide à décider d’aller dormir raisonnablement tôt mais avant de ce faire, nous faisons connaissance avec nos voisins russes. Communication difficile car il y a que Igor qui parle un peu anglais. Ils ont monté un beau camp, 2 grandes tentes, l’une hébergeant leurs petites tentes et l’autre servant de terrasse à l’abri de la pluie. Une troisième tente d’une drôle de forme, mais équipée d’un poêle au bois. On se dit qu’ils ont l’habitude de rien ces russes, il fait assez chaud déjà pour ne plus avoir besoin de chauffage. Igor se rend compte qu’on parle de leur tente « spéciale » et invite Gregg à y jeter un coup d’œil. Deux minutes plus tard Gregg arrive en courant nous demandant si un sauna ça nous dirait. Je lui répond que je n’ai point envie d’aller en ville pour prendre un sauna. Il me répond en rigolant que le sauna est à 15 mètres. S’avère que la tente « spéciale » des russes est un sauna… Poêle au bois, pierres incluses, seau d’eau, bancs en bois, un compartiment douche/vestiaire… la totale. Ni une, ni deux qu’on se déshabille, nos voisins d’Autrolls se demandant ce qui se passe, et qu’on se présente vétu d’un essui chez nos voisins russes. C’est assez irréel comme sensation. Au beau milieu de nulle part on se retrouve à poil avec 2 parfaits inconnus dans un sauna de fortune. Tudor et Gregg partagent ce sentiment. Incroyable. Pour se rafraîchir, on peut choisir entre une douche froide et une promenade sous le ciel étoilé. Le comble, Igor envoie même sa compagne chercher des bières au bar du camp. Ils savent recevoir les russes. Je crois qu’on est bien resté 2 bonnes heures dans ‘notre’ sauna. Je fais des trophy depuis 2006 et jamais je me suis senti aussi propre sans avoir quitté le camp.
Comme quoi, quand on pense avoir tout vu…
Samedi. Trophy Day et Night Stage. Pour le trophy day nous partons en cortège vers la carrière sous un soleil de plomb. Gregg est assis sur la roue de secours. Position idéale pour notre photographe. Il y a une épreuve au dessus de l’eau, faut tendre les câbles de treuil de façon à permettre à un des copilotes de traverser la mare à une bonne 10aine de mètres de hauteur. Les Trophy y vont d’abord. Après 3 groupes trophy j’ai compris, ça va prendre des heures. En plus il y a d’autres épreuves individuelles de prévues donc on ne sera jamais de retour avant 20 heures, il faudra encore manger avant de prendre le départ de l’étape de nuit sans oublier que le Landcruiser n’a pas de phares donc nous devons encore monter les longues portées sinon ça risque d’être difficile, la navigation dans le noir.
Nous décidons donc de ne pas attendre et de retourner au camp pour monter nos phares au lieu d’attendre encore des heures au soleil pour rouler 3 minutes. Au classement ça ne changera rien donc on ne s’en fait pas. Une fois de retour nous nous occupons avec l’installation des phares Warn sur le capot. Forer des trous pour les attacher, d’autres pour faire passer le cablage, brancher le tout en faisant attention de brancher les phares même sur 24v et les commandes sur 12v, petit test et miracle, tout fonctionne à merveille. Nous voilà parés pour le nightstage.
Gregg est déjà parti avec les journalistes lorsqu’on se rend vers le départ. Seul ombre qui plane sur nos chances de rallier l’arrivé sans se perdre… notre trip qui ne fonctionne toujours pas. Mais bon, je compte sur le flair de mon copilote pour trouver le bon chemin dans le noir. Je n’ai aucune idée de ce que les autres ont fait pendant l’épreuve trophy de cet après-midi mais à nouveau, nous ne partons pas dernier. Tout va bien, Comme d’habitude dans ce genre de trophy, faut pas trop se poser des questions coté classement. Nous nous en foutons royalement mais ceux qui pensent devoir partir devant nous et qui doivent partir derrière ne sont pas de cet avis. Qu’à celà ne tienne, c’est à nous et nous nous engouffrons dans la forêt. Même point de départ que l’an passé, même scenario au premier point de roadbook. Des voitures dans tous les sens. Tudor m’envoie dans la même direction que j’avais indiqué à Thierry l’année passée. A savoir la mauvaise. Je reconnais l’endroit, nous faisons demi-tour et durant le reste de la nuit Tudor ne se trompera plus. Pas rien sans trip. Nous devons passer par le même chemin creux où on s’est planté au premier roadbook. En y arrivant un embouteillage impressionant. On comprend vite pourquoi. En haut on peut distinguer une veste fluo d’un marshall ce qui veut dire PC. Faudra donc passer par là. Avec des blocs qui fonctionnent on arrive à peine 5 mètres plus loin que deux jours auparavent mais le treuil ne nous lâche pas cette fois et nous sommes en haut en un rien de temps. S’avère que le PC est uniquement pour la trophy class. On aurait pu faire le tour et éviter la file. Grrr… Soit, un peu plus loin notre premier PC de cette nuit. Oasis rassurant qu’un PC pendant un roadbook de nuit. Feu de bois, marshalls souriants, aide en cas de pépin. Echange de politesses avec les marshalls, Schnee (patronne du club 4×4 qui fournit les marshalls) qui fait la photo obligatoire et c’est reparti pour la suite. La suite se corse un peu, quelques passages scabreux en dévers, beaucoup de croisements qui se suivent et qui se ressemblent, pas facile sans trip de choisir le bon mais Tudor est infaillible. Nous arrivons dans un creux, faut suivre le ruisseau et les traces se creusent et se croisent. Les blocages refusent à nouveau tout service et j’essaie d’aller le plus loin possible plus ou moins à cheval sur les traces. Près du chemin forestier qu’il faut emprunter après il y a toute la presse. Quelques véhicules y treuillent et je dois lever le pied pour pas les toucher ce qui nous fait glisser dans les traces. Du coup on est bon pour treuiller également. Les photographes adorent évidemment. Il y a des arbres en suffisance et on n’est qu’à 10 mètres de le terre ferme donc pas de stress. Petit treuillage, cachet du PC et c’est reparti dans la nuit.
Un peu plus loin un ruisseau à passer. Gros croisement. Plus de blocs. Je met le 42 dedans et il y reste. En essayant de ressortir en marche arrière pour tenter une ligne quelque peu différente un bruit inquiétant. Crac-crac-crac… Je pense de suite à un arbre de roue, un joint cinétique ou une couronne de différentiel. J’appelle Tudor et lui dis de regarder les essieux, s’il y a de l’huile quelque part, si les arbres de roue arrière sont encore intacts, si les roues tournent ou pas… Il me dit que tout va bien. Je réessaie. Même bruit. Stress. Puis Tudor me dit de me calmer et de simplement sortir à l’aide du treuil qui est déjà attaché. En ce faisant je n’ai aucune traction sur les roues. Catastrophe… Quand je m’arrête, Tudor me dit que selon lui c’est les roues qui frottent dans la caisse lors de gros croisements. Evidemment. Quel con je suis. Mais pourquoi je n’ai pas de traction alors ? Euh… sans doute parce que le levier du transfert se trouve en neutre entre les courtes et les longues. Le levier se trouvant fort à droite, il est fréquent qu’en sortant ou en bougeant, le copilote le touche avec le genou ce qui suffit pour le pousser en neutre. Gros soulagement. Je sais rire à nouveau. On enroule le câble du treuil et c’est reparti. J’adore rouler dans les forêts la nuit. Tout est différent, c’est plus difficile pour le copilote mais j’oserais dire plus facile pour le pilote. Là où on met les roues c’est bien illuminé, le reste on ne le voit pas donc pas de distractions. En plus, si on roule en ‘cabrio’ comme nous, on a plus froid quand on descend dans les vallées, on sent mieux les mille-et-une odeurs qui planent dans les forêts et les marécages. Vous aurez compris, ça ne me gène pas du tout une étape nocturne. Il est vrai que les treuillages sont plus délicats ou dangereux à cause de la visibilité mais tant qu’on est seul dans le noir ça ne pose aucun problème. Nous arrivons 16ième et seront classés 13ième de cette étape. Pas mal sans trip ni blocages. Dernières vérifications du BJ et au lit. Demain ‘circuit day’.
Bercé par le bruit de la pluie sur la tente je dors comme un ours. Le lendemain matin il fait plein soleil. Nous sommes assez contents car nous roulons sans toit donc une journée de pluie… pas agréable. Vu les prévisions pour l’après midi nous décidons de laisser la bâche que l’on avait attaché sur le BJ en guise de ‘toit’pour la nightstage. Tudor s’affaire en dessous du BJ pour essayer de réanimer le compteur et le trip. S’il continue comme-ça il va finir mécano, mon ami architecte-navigateur. De mon coté, je démonte le compresseur ARB pour un diagnostic final, mon nez me dit déjà que le truc a cramé mais bon, peut-être qu’on peut le réanimer… c’est négatif de ce coté, il est cuit, littéralement. J’enterre le compresseur et j’annonce à Tudor qu’il nous reste 4 jours d’offroad assez hard sans blocages. Comme moi, il considère ça comme étant un détail. Tant que le moteur fait tourner les 4 roues et que le treuil tourne quand ces roues ne nous feront plus avancer il n’y a pas mort d’homme. Après avoir mangé un bout, nous nous joignons à l’impressionnant cortège de voitures sorti droit de Mad Max. Le terrain du prologue accueillera également le ‘circuit race’. Ca promet, pluie annoncée, un terrain marécageux et une partie dans le bois où il y a un single track en dévers glissant à souhait. Ca va ressembler à du patinage artistique en 4×4. Nous avons la chance de partir dans le premier groupe donc le terrain sera intact pour les premiers tours. Tudor part en reconnaissance à pied et m’en veut un peu de ne pas l’accompagner mais j’ai mal au dos à crever et je connais le tracé par cœur, il est à 85% identique à l’année passée. Au moment du départ il pleut déjà.
Je laisse partir la meute dans des gerbes d’herbe, de boue et des bruits de tôle froissée et je pars beau dernier, à l’aise. Ils font tous comme je l’avais espéré et entrent un par un dans la descente en bas de laquelle il faut prendre à droite. Tout le monde veut prendre cette descente de biais mais ayant fait un peu de circuit je sais parfaitement bien qu’aller tout droit, freiner au dernier moment et tourner plus court sera toujours plus rapide. Nous dépassons donc toute la file qui est à la queue-leu-leu par la gauche, nous descendons la pente tout droit, petit freinage en bas, on tape la deuxième courte et on se jette dans la bataille. Les quelques 5 ou 6 voitures qui du coup se trouvent derrière nous ne trouvent pas ça marrant. Surtout que dans le bout de bois qui fait un bon tiers du parcours, dépasser est impossible. Suite aux scènes apocalyptiques de l’année passée, il y a un monde fou dans le bois, tous les spectateurs ou presque y ont trouvés une place. A notre étonnement le BJ se joue des courtes côtes parfois très glissantes. On est assez réaliste pour savoir que les tours suivants, tout se fera au treuil car après un passage du groupe il ne restera plus rien où nos Swampers pourront s’accrocher. La partie roulante profite aux véhicules mieux suspendus et nous laissons passer qui veut… c’est-à-dire personne lors du premier tour, Le 3Bturbo a de beaux restes et avec un treuillage d’avance, personne ne nous rattrape avant la descente en dévers. Au premier tour ça passe sans trop de problèmes, le marécage après également. Nous y voyons Nati, la photographe israélienne, dans un attirail de fortune, sous un parapluie emprunté en train d’essayer de faire quelques photos malgré la pluie battante. Le deuxième passage dans le bois est apocalyptique, le dévers avant le marécage, je le laisse où il est, devenu trop glissant, je choisis de faire une nouvelle trace, tout droit vers le bas à travers tout puis cap à droite pied au plancher afin de rejoindre la ‘piste’. Nous suivons le Grand Cherokee V8 de nos amis hollandais depuis le début sans vraiment être lâchés. Dans le bois une glissade de l’arrière lors d’un treuillage (puisque je vous disais que ça glisse) nous coince entre deux arbres. Vu que nous n’avons pas de treuil arrière pour nous déloger de cette position et que nous bloquons l’unique trace, l’équipage d’un Toyota russe nous sort à l’aide de leur treuil avant en faisant un mouflage dans le règles de l’art. Pendant qu’ils nous remettent l’arrière du Toy sur la trace nous treuillons l’avant dans la bonne direction et la fête continue. Glisser, patiner, treuiller et recommencer. A un endroit spécifique un équipage croate de la classe trophy, qui est descendu dans notre classe, essaye de passer en treuillant sous un autre angle. Seulement nous sommes presqu’en haut , à 4 mètres de l’arbre auquel nous treuillons alors qu’eux attachant leur corde de treuil en croisant devant nos roues histoire de nous bloquer. Cette audace leur coute une corde de treuil car je continue à avancer et les Swampers coupent la corde sous tension sans aucun problème. Le marshall qui a son nez dessus dit aux croates d’écraser, nous fait un ‘thumbs up’ et nous continuons. Nous rattrapons le Grand cherokee dans les ‘stand’ pour le changement de pneu obligatoire et terminons sans avoir cassé quoi que ce soit sur le BJ. La pluie a redoublé d’intensité. Nous souhaitons beaucoup de chance aux concurrents qui doivent encore rouler et rentrons au bivouac. Sieste et manger. Nos voisins russes, en revenant nous expliquent qu’ils ont fait un beau flanc mais ça ne se voit franchement pas à leur carrosserie. Faut dire que leur Toy en a déjà vu des vertes et des pas mures dans les trophy russes.
Tudor me demande si j’ai déjà regardé l’eau et l’huile du Toyota. Je lui répond que non, que c’est un Toyota et que c’est point nécessaire. Il me regarde d’un drôle d’air et je tire la jauge quand-même pour lui faire plaisir.
Le lendemain nous partons pour un très long roadbook. Il pleut toujours. Alors qu’aucun de nous deux avait vraiment envie de prendre le départ avec ce temps pourri, une fois dans le roadbook on s’amuse et on profite pleinement de ce que Igor et Andjelko nous offrent en matière de tout terrain. La première descente digne du nom nous emmène par un ‘champs’ d’arbres abattus aussi large que 2 voitures vers la vallée. Seulement, glissante et raide comme est la pente, difficile d’éviter les souches et le BJ se plante avec sa lame avant droite sur une souche. Marche arrière. Rien… Je dis à Tudor d’utiliser le Hi-lift pour nous déloger mais quand il se met devant le BJ, vu la pente il n’arrive même pas à hauteur du capot et me demande de bien vouloir le faire. Il prend le volant. J’ai besoin de quasi toute la hauteur du Hi-lift pour que la lame glisse par-dessus la souche et qu’on puisse continuer. Evidemment, derrière il y a une file. Tiens, nous étions partis dans les derniers pourtant. C’est dire que beaucoup d’équipages se trompent continuellement de chemin. Nous laissons passer 2 équipages et continuons. En bas ça s’ouvre. Ca veut dire qu’il y a un beau marécage. Effectivement nous voyons les équipages que nous avons laissé passer et quelques autres qu’étaient devant bien plongés dans le marais. Dépourvu de blocages… pas trop d’arbres pour treuiller car ceux qui sont coincés sont restés près de la lisière du bois et doivent tous treuiller. Tudor me dit d’attendre, de ne pas faire des conneries et d’y aller quand les autres se seront libérés. C’est rare mais là je ne l’écoute pas. Il dit qu’il ira déjà à pied et me laisse seul. Pas de blocs donc une seule solution. Faire jouer la puissance. Malgré l’air pépère de notre BJ il y a quelques chevaux sous le capot. Je met la boite en ‘longues’, je tape la première et je me lance à l’assaut de notre premier vrai marécage. Pied au plancher, 2ième, choisir une ligne initiale qui évite les premières traces profondes et compter sur les Swampers, le 3Bturbo et le poids relativement bas du BJ. Je ne le crois toujours pas comme j’écris ces lignes mais le BJ est passé. Pied au plancher et les yeux fermés (ou presque) mais il est passé. Sentiment incroyable. Jamais j’aurais cru ça. Je suis passé au nez et à la barbe d’un G, de deux Def et d’une Wrangler, tous tentant de se sortir de là et bien plantés malgré que je bave quand je vois leur préparation. Tudor remonte dans le BJ en me disant qu’il ne savait pas qu’on avait autant de puissance et que vu de l’extérieur c’était assez impressionnant. Leçon à ne pas oublier, les blocs, dans un marécage… ça ne sert pas à grand-chose.
Nous continuons et nous arrivons en haut d’une pente à descendre. S’agit d’un bois humide et la pente a des allures de toboggan géant entre les arbres . Vu les traces au sol et les bouts d’arbre manquants c’est une descente assez sportive surtout dépourvu de treuil arrière. J’engage la 2ième courte et nous plongeons vers le bas, surfant entre les arbres. Nous arrivons en bas sans problèmes. Enfin, presque en bas. « En bas », c’est 10 mètres plus bas, un ‘V’ boueux à emprunter. Le G de nos amis belges y est coincé, treuil avant HS, une autre voiture belge descend au treuil pour essayer à les déloger. Faut dire que la pente est assez raide et hyper-glissante. Quand Le G est sorti et le Def qui l’a délogé l’a suivi, un équipage hollandais s’y engage. Nous attendons et nous regardons. Je crois bien pouvoir descendre en roulant mais bon, c’est con de prendre ce genre de risque. Le BJ est à 20 mètres, il y a un dévers glissant jusqu’à la descente. Dangereux. Tout le monde a treuillé ici. On fait la même chose. Tudor trouve un bon arbre et nous treuillons le BJ jusqu’à la descente mais pas moyen de l’y engager en marche arrière. Après 3 tentatives je demande à Tudor de changer le point d’ancrage du treuil et de prendre un arbre bien plus haut dans la forêt. Il comprend de suite ce que je veux faire. Un peu plus loin il y a un’V’ qui descend parallèlement à la descente glissante mais il faut être plus haut pour pouvoir s’y engager. Pas besoin de treuil pour celui-là, le sol est vierge, feuilles et terre. On se treuille, Tudor me détache, première courte et 30 secondes plus tard je suis en bas, tout en évitant la trace boueuse en bas où tout le monde se plantait. En bas les autres équipages nous regardent comme si on descend d’une autre planète. Tout le monde s’arrête, les uns pour vérification du véhicule, les autres pour constater que le treuil est bel et bien mort, et les plus chanceux, dont on est, simplement pour manger un bout. Nous sommes dans une partie très étroite, le début d’un marécage sans fin et Tudor prend son sandwich et part avec Mark, le co de l’équipage hollandais en reconnaissance. Ils reviennent 10 minutes plus tard, il y a une bonne nouvelle et une mauvaise. La mauvaise, c’est le grand marécage de l’année passée. La bonne, Tudor a trouvé un chemin ‘roumain’ pour longer le marécage sur un bon 150 mètres après quoi du coté où on déboucherait, le marécage est vierge donc probablement franchissable. Un chemin ‘roumain’, c’est une ouverture dans le bois, aussi large qu’une voiture où les arbres sont jeunes, on peut deviner un ancien chemin à cet endroit donc. Défaut de tout chemin roumain, c’est que c’est d’office un dévers. Faut juste que le premier véhicule aplatit les arbres et se fraie un passage pour en sortir.
Vous l’aurez deviné, nous prenons la tête du mini cortège et contournons ce faisant un bon bout du marécage.
La première partie dans le marécage est comme prévu franchissable puis on arrive à une ligne d’arbres le long d’un ruisseau débouchant dans une rivière, perpendiculaire au marécage, dûment indiqué dans le roadbook. Heureusement que Tudor et Mark sondent le ruisseau boueux car on aurait dit un truc de 10 cm de profondeur alors que je vois Mark -qui jauge en marchant dedans (technique hollandaise on présume)- qui y disparait jusqu’à son derrière. Bon, profond. Il y a un passage au bout très étroit mais moins profond. C’est par là que nous passerons à l’aide du treuil car les bords sont verticaux. Le genre de truc quand tu fonces dedans tu laisses ton essieu avant au minimum et quand tu y vas doucement sans vérifier s’il y a de quoi treuiller, tu es bon pour attendre un concurrent qui veut bien t’aider pour ressortir en march-arrière. Nos amis hollandais qui continuent un peu trop loin sur un dévers le long du marécage suivant et nous font une belle figure, braquant juste à temps vers le bas et plongeant dans la mare avec une grâce qui ne pourrait être égalée que par Obélix. Astérix, (Tudor) les aide au treuillage et surtout à défaire le nœud dans la corde que Mark (c’est son premier trophy) n’a pas vu. Quand c’est à moi, je quitte le dévers plus tôt et j’arrive au même endroit. Treuillage et repartir.
Nous arrivons dans un labyrinthe de ruisseaux suivi d’une montée raide et glissante avec une terrasse au milieu. Treuillage obligatoire. Nous arrivons jusqu’à la terrasse en roulant, puis il nous faut la longeur complète de la corde. Une fois en haut ça redescend à pic vers un marécage. L’entrée de ce marécage est un plongeon dans des traces profondes qui disparaissent à gauche. Trop profond pour nous je pense et je braque à gauche pour faire une nouvelle trace et d’entrer dans le marias 10 mètres par la gauche. En même temps je veux laisser passer le proto Toy/troll belge qui nous a rattrapé. Manque de bol, en braquant à gauche et en tentant de remonter un peu l’arrière du Toy glisse vers le bas, et je n’ai pas d’autre choix que de mettre la marche arrière en regardant droit dans les yeux de l’équipage belge que je voulais laisser passer. Bon … treuillage. Je m’excuse de cette drôle de manoeuvre auprès de mes compatriotes, ils passent et nous suivons à notre rhytme. Nous nous amusons bien mais le Defender belge que nous retrouvons un peu plus loin a cassé l’essieu avant. Vu l’heure avancée nous décidons de rentrer tous ensemble. Coup de chance, il y a un PC juste avant que nous ne voulions quitter le roadbook pour rentrer. Nous signalons aux marshalls ce que nous avons l’intention de faire et nous rentrons vers Topusko par la route.
Ce fût une belle journée, nous avons pu ramener le BJ en une pièce une fois de plus et nous fêtons ça avec un bon repas au bivouac. Nos amis de Autrolls dans notre classe ont quasi été jusqu’au bout de ce roadbook marathon. Une chauffe moteur en décida autrement. La mort dans l’âme ils doivent abandonner et retourner au camp pour réparer. Dépose et nettoyage du radiateur. Le mien est au moins aussi crade que le leur mais jamais le 3B n’a même commencé à chauffer un tout petit peu. Le 3B couplé à un turbo a justement tendance à chauffer mais uniquement si on met le pied au plancher sans soulager. Pas vraiment mon style de conduite. Semble qu’en plus j’ai un radiateur ‘africain’, plus épais, moins sujet à la chauffe quand il se colmate. Jusqu’au dernier jour, jamais on nettoiera le véhicule ni le radiateur. Quel bonheur, un ancètre de plus de 30 ans… Thierry, le troll en chef, rentrera tard, très tard, en tractant un autre véhicule de la classe trophy. Fidèle à lui-même il nous raconte sa journée dans son style inimitable. On demandera à son fils et copilote Dylan comment s’est déroulée cette journée exactement. Quoique… tel père tel fils. Mais bon, en prenant les deux versions on s’approche d’une vérité probable. On peut que les aimer ces deux-là.
Les russes ont cassé un de leurs treuils et 6 goujons. Ils viennent s’approvisionner dans mon stock. J’ai ce qu’il leur faut et je suis content de pouvoir les aider. On passe une partie de la soirée sous leur tente –terasse en racontant des bétises en en buvant on ne sait pas trop quoi.
Mardi. Roadbook costaud une fois de plus. Nous sommes prêts. Le BJ, lui est prêt depuis plus de 30 ans… C’est parti. Envie de le terminer, celui-ci. Au départ la confusion habituelle. Nous arrivons juste à temps. Départ dans 5 secondes. On part dans des traces profondes dans une forêt humide à souhait. Cent mètres plus loin un énorme trou dans le chemin, un ruisseau en contrebas. Treuillage pour tout le monde. Au lieu d’essayer de rester en haut le plus longtemps possible en espérant ne pas me retrouver dans une drôle de position après la glissade inévitable, je braque à droite et je roule droit dans le trou. Au moins comme ça pas de risque de me retourner. Tudor est déjà dehors et le treuil déroulé. En un minimum de temps notre Toy se trouve de l’autre coté. Nous continuons dans les traces. Ca monte, ça redescend. Tiens voilà nos amis en Patrol, ils nous dépassent et vont s’enfoncer dans une trace par où on ne devait pas passer et se coincent entre deux arbres. Drôle de manoeuvre.
Nous contournons les traces profondes et l’endroit où ils se trouvent par la droite, une petite descente assez raide, un coup d’accélérateur et nous sommes sur le chemin forestier un peu plus bas. Il y a pas mal de véhicules qu’on connait garés le long du chemin. Presse. Difficulté et spectacle donc. Grosse descente suivie par une aussi grosse montée. Spectacle donc, pas de grande difficulté. Juste un gros treuillage pour nous car pas de blocs qui nous seraient bien utiles dans une situation comme celle-ci. Tout le camp semble se retrouver là. Gregg derrière un arbre, Spyros un peu plus haut. Martin et Mark… que des photographes. Nous passons le PC en bas de la descente et vu que la trace de droite est bloquée je veux prendre tout droit. C’est plus raide mais vu que je dois treuiller en tout cas ça ne changera rien. Le marshall nous en empêche. tout droit c’est pour la trophy class, nous devons prendre à droite et attendre notre tour. Merde. Ce que je crains arrive. Le temps d’attendre que les autres passent à droite, les premiers de la trophy class arrivent et c’est le boxon. Nous treuillons une partie, puis je sais rouler un peu. Je colle le BJ contre un arbre à gauche. Le temps de prendre le cable du treuil l’équipage maltais en Buggy monte la pente pied au plancher. Vu le dévers le buggy glisse vers le BJ et se cogne à ma roue avant droite qu’était braqué à droite. Gros coup mais pas de conséquence… enfin je pense. Le copilote qui suit en courant s’excuse. Incident de course, ça arrive. Rien de grave. En haut nous faisons une pause, Tudor reprend son souffle, on enroule la corde comme il le faut. Loic et Pascale arrivent avec leur troll jaune. Nous les laissons passer avant de continuer. Le roadbook est magnifique. Forêts, marécages, prairies innondées… tout y est. A un certain moment nous devons chercher notre route au beau milieu d’un nombre inimaginable de ruisseaux. Tudor va voir à pied, je suis doucement. Une grosse branche se loge entre l’arceau et le pare brise. Je recule mais la branche me bouffe quand-même le pare brise. Nous continuons encore un moment comme ça mais la visibilité est quasi nulle. Après un passage dans des traces porfondes pour traverser une clairière Tudor me dit de faire attention à une souche. Quelle souche ? Invisible avec le pare brise dans cet état. Nous nous mettons sur le coté à l’aide du treuil et nous mettons nos pieds dans le pare-brise. On le dépose au pied d’un arbre où il y a déjà quelques reliques de 4×4. Nous récupérons le joint car il coute plus que le pare-brise même et nous continuons après avoir mis le tuyau du snorkel à travers la baie du pare-brise, de cette façon il ne s’abimera plus quand on frôlera l’un ou l’autre arbre. Le parcours est magnifique aujourd’hui. Beaucoup de tronçons dans lesquels on peut emprunter une autre trace en surfant les pentes dans la forêt. Il faut d’ailleurs les surfer car le tracé d’origine est souvent un gouffre de boue noire qui te mange ton treuil, ton radiateur et ton embrayage.
Il y a des passages devant lesquels on se demande vraiment comment Andjelko peut s’imaginer ne fût-ce qu’une seconde qu’un véhicule de la classe Adventure puisse les traverser… Et pourtant, ça passe. Une marée de boue noire déjà dûment labourée me restera toujours à l’esprit je crois. Un cuvette à passer, pas moyen de contourner, en plus, les bûcherons avec leurs lumberjacks qui ont fait ces traces ont oublié quelques arbres dans la soupe, rendant tout treuillage encore plus délicat. Tudor, après une reconnaissance à pied et à 4 pattes pour pouvoir avancer dans cette purée noire me dit qu’il me treuillera sur plusieures courtes distances, changeant chaque fois de point d’ancrage pour me guider entre les troncs d’arbre que l’on devine çà et là dans le marais. Ca nous prend une bonne vingtaine de minutes mais on passe sans problèmes. Nous continuons dans les buissons car pour emprunter le tracé il faut un mélange d’un char Abrahams et d’un sous-marin nucléaire. Un peu plus loin pas d’autre choix que de replonger dedans. Mini cuvette à traverser au treuil, 10 mètres à peine mais entre le point d’entrée et les arbres qui peuvent servir de point d’ancrage pour le treuil, à chaque fois un bout d’arbre susceptible d’arracher quelque-chose en dessous du Toy. Je manœuvre le BJ vers la droite et Tudor met le treuil le plus loin possible vers la gauche. Ce faisant nous treuillons sur un dévers que nous nous créons tout seul mais au moins on évite tout danger pour la mécanique. Ca remonte et on va vers un chemin forestier.
En sortant de la forêt nous tombons sur nos amis de l’assistance d’Autrolls et Gregg qui les accompagne pour la journée. Ils nous ont vu passer il y a une une heure ou deux et s’étonnent de l’absence de notre pare-brise. Nous rigolons et expliquons que la forêt nous l’a bouffé et nous continuons. Ca replonge de l’autre coté du chemin. Tobogan comme on en a déjà connu beaucoup. Mais j’ai l’impression d’avoir crevé à l’avant droit ou bien cette trace est incroyablement plus glissante qu’elle en a l’air. Vérification faite, la barre de direction est tordue, ressemble à un arc au lieu d’être droit. Merde, fini pour aujourd’hui. Nous ressortons de la forêt en treuillant chaque fois que l’on doit tourner à droite et avisons en haut. J’ai une manille énorme qui a dû être faite pour des bateaux genre Titanic que je glisse sur les barres de direction là où elles se joignent. Mais même avec un gros marteau et avec toute la force que j’ai, pas moyen de le faire glisser vers le milieu pour redresser la barre. Euh… ah, tiens, nous avons des grosses sangles avec nous, enfin… une qui tient la roue de secours et une autre qui tient le Hi-lift. A l’aide sangles on arrive à faire bouger la manille. On utilise la deuxième sangle pour la tenir en place.
C’est parti, cap vers le camp. Les bouts des sangles assez longues, au lieu de les laisser trainer en dessous et de risquer qu’elles s’enroulent autour de l’essieu ou pire, nous les avons mis par au dessus du capot à travers le cadre de pare brise et Tudor les tient comme s’il conduisait une diligence. En arrivant au camp les gars de l’orga et Boros, qui est déjà arrivé, nous demandent ce qu’il y a et on explique tant bien que mal qu’on a un problème de direction. Ils en concluent que nous sommes revenus jusqu’au camp en conduisant avec les sangles comme toute direction. Grands yeux de leur coté et fou-rires du nôtre.
Mais bon, faudra réparer. Il se met à pleuvoir franchement. Nous démontons la barre de direction et nous nous demandons comment redresser cette barre en acier aussi spéciale que délicate. Je me rappelle que Thierry avait dit l’an passé qu’il prendrait une presse de 15 tonnes s’il reviendrait. Je vais voir son assistance, j’ouvre la camionette et effectivement… une presse de 15 tonnes. Le genre de miracles qui épicent un trophy comme celui-ci. Pieter, qui nous a aidé à démonter le truc mène le redressage comme un chef. Bon, faut renforcer la barre sans quoi ça pliera au premier tournant. Les barres de direction du BJ7 que j’ai dans la camionette sont différents et peuvent pas servir mais ils sont renforcés avec des profils en ‘U’. Suffit de les disquer et de les souder sur notre barre. Euh, disqueuse et poste à souder, deux trucs qui ne se trouvent pas dans notre boite à gants. Thierry a bien un poste à souder mais le connaissant il aura plus qu’assez de boulot sur son Troll en revenant et quelque-chose me dit qu’il ne rentrera pas trop tôt. Les autres étant susceptibles de pouvoir nous aider sont encore dans la forêt donc nous décidons d’aller manger d’abord. A table nous tombons sur un pote qui fait l’assistance des Nico. Il demande comment s’est passé notre journée. Nous lui expliquons en mentionnant que nous avons juste besoin de quelqu’un avec une disqueuse et un poste à souder. Il dit que nous avons qu’à passer chez eux après le dessert, Steven se fera un plaisir de nous souder ça. Comme d’habitude, un pépin mécanique qui dans le monde normal avec ses garages et ses stocks de pièces prend une semaine voir plus à réparer tout en coutant un pont s’arrange en une demi-heure pour quelques bières au milieu de nulle part. Steven nous soude le renfort avec le sourire avant même de commencer à travailler sur sa propre voiture. Il y a des gars qui méritent une statue des fois.
Il pleut des cordes, il fait noir, j’aime pas mécaniquer sous ses conditions donc on montera la barre demain matin. Tous au dodo.
Mercredi matin. Il fait beau. pendant que nous montons la barre, Françoise (Euro4x4Parts) vient nous dire bonjour. Elle veut savoir comment ça se passe. Elle m’a offert mes amortisseurs et sponsorise l’évènement en soi également. Je lui dis que depuis mes Koni, je n’ai plus eu des amortos aussi solides. Les Tough Dog ne bougent pas d’un poil. Matériel impeccable. Le montage fini, nous allons déjeuner et en revenant nous voyons que nos voisins russes plient bagage. Problèmes familiaux graves coté pilote, ils rentrent au plus vite. Dommage, c’étaient d’excellents voisins. Et on n’aura plus de sauna…Vu le temps magnifique et l’absence de pare brise, nous bazardons les restes du bikini-top. Ca allège encore le BJ d’un bon 500 grammes me dit Tudor en souriant.
C’est parti pour l’avant dernière étape. Nous roulons bon train, les difficultés se suivent, pour la plupart des lumberjack tracks, rien de transcendant jusqu’à ce que nous arrivions devant une énorme colline dévastée par les bûcherons. Des arbres dans tous les sens et une seule trace pour monter la première partie. Nous arrivons assez loin et treuillons le dernier bout. Juste à temps, voilà tout le monde qui arrive. Classe Trophy, quads trophy… comme des sauvages ils prennent la colline d’assaut. Après la première partie c’est chacun pour soi et les buissons ne retiennent personne. Il y a des équipages dans tous les sens, certains redescendent même. Nous baptisons cette colline Hamburger Hill et nous nous lançons également à l’assaut de la deuxième partie. Le BJ va assez loin, juste encore un petit bout de treuillage et nous sommes en haut du plateau que je reconnais de l’année passée. Il fait beau, il fait chaud, il y a plein d’arbres couchés qui peuvent servir de banc. Nous nous arrêtons pour un pic-nic bien mérité. Nous sommes rejoints par nos amis hollandais en defender et par John et Adrian en quad. Les hollandais pour qui une place est une place, partent après 5 minutes, nous prenons notre temps. Adrian a même un compartiment secret dans son quad d’où il sort des mars frais. Du grand luxe dans cet endroit. Après une bonne vingtaine de minutes, c’est reparti. Les chemins de bucheron se suivent et se ressemblent. Jusqu’à ce qu’il y ait comme un grosse erreur dans le roadbook. Si on descend du chemin à l’endroit indiqué, il y a bien des traces mais ces traces mènent nulle part. De plus nous passons sur des bouts de bois qui se mettent d’accord pour arrêter et soulever notre BJ dans une descente à 30%. Embêtant. Les bouts de bois sont bien coincés. Pas d’autre option que de lever le BJ à l’aide du hi-lift et essayer de déloger les longues branches, opération assez délicate dans une pente glissante mais ça fera l’affaire. Entretemps Tudor a été voir plus bas, ce n’est pas par là en tout cas. En haut nous retombons sur au moins 5 autres équipages cherchant le bon chemin. Coup de fil à l’organisation, euh, au lieu de 80 mètres il faudrait rouler 1 kilomètre 300 si je me souviens bien.
Après beaucoup de jardinage on finit par trouver la bonne trace, maintenant en compagnie d’un autre équipage hollandais, les fous en grand cherokee V8 à essieux portiques. Nous les connaissons depuis plusieures années, ayant couru 2 ou 3 Istra Challenge ensemble. Nous nous engouffrons dans la forêt. Traces glissantes ou profondes, bourbiers, montées sans fin, descentes interminables jusqu’à ce que nous arrivions dans un bouchon. Au moins 10 équipages. Ah… il manque un bout du chemin et nous roulons dans une corniche. Pas mal… mais pas un exercice à faire quand on n’a pas de treuil arrière donc demi-tour en espérant pouvoir rattraper le tracé plus loin.
Nous avions fait un pacte avant de venir, Tudor et moi. On s’était promis de ne pas passer la ligne qui sépare les fous des imbéciles. Nos amis hollandais ont également fait demi-tour et on les retrouve en haut.
Faire demi-tour n’est d’ailleurs pas si facile que ça sur la corniche en dévers et nous devons treuiller à 2 reprises pour remettre le BJ sur le chemin après une faute de ma part. Nous retrouvons le tracé qui nous enmène dans des traces de boue profondes des lumberjacks. Nous en contournons une bonne partie mais un moment donné il faut s’y engouffrer ce qui veut dire treuiller pour notre BJ à lames. Tudor va voir à pied, il y en a pour plus d’un kilomètre. Non merci. Il est déjà tard, nous avons perdu un temps bête comme tout le monde avec cette erreur dans le roadbook et nous décidons de rentrer. Casser la voiture la veille du finish serait bête et nous avons eu plus que notre dose de 4×4 aujourd’hui. En rentrant on s’arrête pour acheter quelques fruits et nous regagnons le camp. Reste que peu de monde. Le camp a l’air vide. beaucoup des équipages qui ont cassé sont rentrés à la maison. Enfin, moins de file pour le repas du soir.
Jeudi, dernière étape. S’il faut finir ne fût-ce qu’une étape c’est celle-ci ; Le BJ est toujours nickel, moteur et train roulant 100%, treuil en ordre. Ca doit être possible. Au départ, 2 équipages sur 3 doivent treuiller après 5 mètres. Un gros trou boueux… l’assistance de nos amis les Trolls s’y trouve et nous encourage d’y aller à fond. Je répond que j’irai doucement et qu’on sortira le treuil pour leur plus grand plaisir. Je suis le premier étonné quand le BJ se joue de cette difficulté sur un filet d’accélérateur. Juste après, ça tourne à gauche dans une prairie inondée et on y aperçoit une Jeep qui émerge encore de justesse. Il nous semble plus sage de rester dans les buissons et de contourner le piège par le droite. Un peu plus loin le roadbook nous envoie à droite dans les forêts donc nous sommes déjà du bon coté. Nous trouvons de suite notre rythme et les pages du roadbook se suivent mais ne se ressemblent pas. A peine 5 minutes dans le roadbook que Boros est déjà derrière. Evidemment lors d’un treuillage car sans blocs à cet endroit on est assez pénalisé. Ca m’emmerde car Csaba est un bon pote et je n’aime pas le ralentir. Mais l’hongrois le prend avec le sourire et dès qu’on peut on le laisse passer. Une longue descente comme d’habitude glissante à mort nous emmène dans une cuve comme on les connait. Magnifique spectacle. Cinq ou six équipages dans la descente qui se tâtent, quelle trace suivre ? Car de l’autre coté de la cuve ça remonte… fort. Une clairière en montée, pas beaucoup de points d’ancrage et huit ou neuf autres équipages qui sont en train de treuiller en face pour monter. Nos amis en G dépourvus treuil avant s’y trouvent aussi. Sont faciles à reconnaître, c’est les seuls qui treuillent en marche arrière. Tudor voudrait faire le tour, personnellement j’opte pour la solution rapide et facile. Je lance le BJ dans la mare, juste en face d’un bel arbre, un treuillage pour s’en sortir, un autre qui nécessitera toute la longueur de la corde pour mener à bien l’ascension. Après un jeu de piste dans la forêt nous empruntons un chemin qui nous mène vers le premier passage à gué du jour, mais uniquement les trophy doivent se mouiller. Nous passons sur le pont après un petit embouteillage et ça devient assez sportif par la suite.
Le tracé pour les deux classes est le même avec juste ça et là des petits détours pour les trophy qui doivent prendre l’une ou l’autre difficulté supplémentaire.
Nous arrivons dans un nouvel embouteillage. Nouveau passage à gué. Il y a 3 véhicules devant nous, quelques autres derrière. Tout le monde fait la file car il n’y a qu’une entrée pour traverser la rivière. Lorsqu’on attend de pouvoir y aller, Tudor sort pour vérifier le snorkel et un imbécile de la classe trophy passe tombeau ouvert coté droit, manque de renverser mon copilote de très peu et rentre dans la Jeep hollandaise qui se trouve devant nous. On croit rêver, un pilota anglais que je nommerai pas, mais qui a ses initiales sur sa marque d’immatriculation, croit opportun de foncer sauvagement à travers tout, pour éventuellement gagner une place insignifiante dans le résultat final. L’hollandais devant nous est coincé, doit le laisser partir devant et est -comme nous tous- ravi de voir que l’anglais choisit la pire des sorties et a toutes les difficultés du monde pour sortir de la rivière. Du coup, la Jeep hollandaise est de l’autre coté en même temps et nous voyons comme il pousse littéralement le def anglais dans les traces en face. Chaque coup de pare-buffle est accompagné d’applaudissements de notre rive. Ou comment se faire qualifier de « connard fini » grâce à une action pas vraiment réfléchie.
Assez rigolé, c’est à nous. Heureusement que Tudor vérifiait le snorkel car il était déboité. Vu la profondeur de la rivière, un snorkel en bon état n’est pas un luxe. Tudor traverse avec la corde du treuil, moi je laisse glisser le BJ tout doucement dans l’eau. Il s’arrête net, le châssis planté dans le fond, le cadre de pare brise à 10 cm de l’eau. Pas mal, pourvu que la corde du treuil ne casse pas… Elle ne casse pas. Le treuil met le BJ à plat dans l’eau, tout l’arrière disparaît sous la flotte. Mon derrière aussi d’ailleurs. Enfin, en deux temps trois mouvements je suis en face et je fais demi tour pour aider John et Adrian en quad. L’un après l’autre je les sors au treuil, tout doucement, sans abîmer leur quad. C’est reparti de plus belle, partie assez roulante jusqu’à ce qu’on arrive à une vallée inondée. Pas moyen de voir la différence entre le ruisseau et la trace… ou bien vu l’abondance de la pluie ces dernières semaines le creux de la vallée s’est transformé en ruisseau. Toujours est il que malgré l’eau nous arrivons à rouler sans trop s’enfoncer. Vraiment spécial. Un tronçon de macadam nous emmène à la deuxième partie de ce roadbook. Quand nous replongeons dans le maquis, je n’ai plus d’indication sur mon voltmètre. Merde. Puis je me rend compte que depuis la rivière j’avais laissé notre court-circuitage branché. Je le coupe et voilà que l’aiguille revient de derrière les 32 volts où elle avait été se cacher. Bonnes batteries, les Exide.
Nous nous enfonçons dans une drôle de végétation et une multitude de petits cours d’eau. Après une descente et le capharnaüm boueux qui nous attend en bas (qu’on court-circuite grâce au coup d’œil de Tudor) on cherche notre chemin entre des petits cours d’eau. On doit en traverser un, c’est clair, mais lequel ? Tudor semble avoir trouvé. Je coupe le moteur et on va voir. Eau sale, boueuse, profonde et berge quasi verticale en face. Mais un bel arbre pour treuiller. Je plante le BJ dans l’eau et ça passe au treuil assez facilement. Pas 3 minutes plus tard à nouveau une multitude de cours d’eau. Il faut traverser le plus grand. On trouve un gué déjà pratique mais on se tâte. Puis on entend une voix familière nous dire « à votre place je n’essaierai même pas ». C’est Loic. Nous l’avions même pas vu. Il se trouve dans une méandre juste à coté, le capot tout juste au dessus de l’eau. Il nous explique qu’il s’est battu 45 minutes de l’autre coté, pour finalement en ressortir à l’aide du treuil arrière. Après cela ils ont essayé ici. Mais les points d’ancrage sont trop fragiles et quand ils en trouvent un bon sur lequel ils peuvent moufler grâce à ce qu’il nous reste comme sangles mises ensemble ce sont les racines et la berge quasi verticale empêchent le troll jaune de s’en sortir. Nous sommes prêts à essayer de traverser 5 mètres plus à droite, plus profond mais un berge un rien plus accueillante et un bel arbre pour treuiller. A ce moment John et Adrian arrivent en quad et disparaissent pour faire apparition sur le berge opposée. Hein ? Mais comment ??? Ils s’arrêtent et nous indiquent un passage avec à peine 50 cm d’eau mais une entrée plus que sportive. La berge d’en face est un genre de faux plat et il y a de quoi treuiller. Deux minutes après nous sommes en face également. Loic et Pascal abandonnent leur tentative et ressortent en marche arrière pour nous suivre. Pas mal ce passage.
Nous arrivons à coté du chemin de fer légendaire dans ce trophy. Un vieux chemin de fer abandonné au milieu des marécages. Nous roulons en longues, pied au plancher en espérant passer car il y a beaucoup de buissons mais point d’arbres pour treuiller. Ce pourquoi je vise le talus du chemin de fer. Par miracle j’y arrive. On repasse en courtes et on continue en bondissant sur les traverses du vieux chemin de fer. Une fois contourné le pire morceau du marais on y replonge. Retour sur le macadam, petite liaison et retour dans nos marécages. Nous passons celui du deuxième roadbook avec les arbres au milieu et utilisons le même passage que l’autre fois. Grosse montée et donc grosse descente dans la forêt et voilà qu’il y a une nouvelle montée entre les buissons. On arrive dans le creux et on est sensé tourner à droite et treuiller jusqu’à plus soif pour remonter. Tudor me fait monter a gauche et me positionne en face de la montée. Je choisis la deuxième courte et je me lance à l’assaut du truc. Encore un passage où j’aurais voulu avoir mes blocages. Mais voilà que je le monte presque en entier. 10 mètres de treuillage et on y est. Nous rattrapons un def anglais qui s’est bouffé un arbre. Ensemble on s’engouffre dans le dernier marécage et la montée herbeuse qui suit. On en fait un concours de treuil. Notre 8274 est plus rapide que leur Gigglepin… comprenne qui peut. Enfin, nous les laissons derrière et parcourons le dernier tronçon seul. Nous arrivons à une espèce de rotonde dans la forêt et de là les indications sont moins précises. Il en reste 4 pour terminer ce trophy. Tudor veut que ce soit juste car il veut absolument terminer en beauté et va voir à pied. C’est une descente digne du nom et si jamais c’est pas juste on est bon pour tout remonter. Il revient avec la nouvelle que ça pourrait, avec beaucoup d’imagination être ça et je jette le BJ dans la pente. On tombe sur Nico qui remonte avec sa tondeuse sur steroïdes. Il nous dit qu’il a descendu le track et que ce n’est pas par là. Mais moi je sais que c’est par là. Ils nous ont dit que l’arrivé est la même que l’année passée et l’année passée c’était par ici. Seulement la dernière case du roadbook, à gauche toutes, est un truc bien caché et il faut même treuiller pour se sortir des traces. Nous descendons donc avec Loic qui a refait son retard derrière nous pour terminer ce trophy comme il se doit. En roulant et par l’arrivée. Igor, le GO s’y trouve avec pas mal de photographes et de supporters. Le sentiment quand on passe la ligne est assez incroyable. Tudor est sur un nuage, moi également et ça se voit sur les photos. Félicitations, rigolades, embrassades…
Nous prenons la route vers le bivouac avec cette drôle de sensation que demain on doit se comporter comme des gens normaux à nouveau. Voilà que sur le chemin de gravillons Nico nous dépasse avec sa tondeuse survitaminée. Je le suis comme un sauvage en deux roues motrices et c’est en un travers assez impressionnant que nous arrivons sur le macadam. Nico ne se calme pas, je ne le lâche pas. Ca va vite, très vite. Je tape la quatre et je dépasse. Lorsque nous sommes cote-à-cote, mon capot s’ouvre. Nous restons sur la route par miracle et refermons le capot. Nico repart en rigolant. Nous aussi. Fin d’un trophy assez fou en bonne et due forme. Tudor me dit que selon lui, le Toy peut encore continuer 3 semaines et il n’y aura toujours pas besoin de mettre une clé dessus. C’est bien là le truc le plus étonnant. Nous avons terminé le Croatia Trophy avec un BJ42 de plus de 30 ans… et nous n’avons eu aucun pépin mécanique…
Tous ceux qui nous ont dit que nous étions fous de tenter cette aventure le maintiennent mais doivent se rendre à l’évidence… c’est faisable avec un vieux tas de rouille japonais.
Je crois bien qu’il y aura une suite à cette histoire en 2014…
Le BJ
*1982
*3Bturbo
*ARB avant et arrière (enfin, parfois)
*suspension Dobinson
*amortisseurs Tough Dog
*Superswamper TSL Q78
*treuil 8274 amélioré avec un BOW2
Texte,
*Koen, 1313Racing
Photos,
*Gregg VDH, 1313Racing
*Françoise Graciet, Euro4x4Parts
*Nati Levi
Croatia Trophy 2013… en BJ42
Succulent récit, comme tous les ans mes yeux brillent …
Croatia Trophy 2013… en BJ42
salut je vient de lire ton recit et pour 2014 je suis chaud a aller au croatia trophy avec mon range v8.pourrait tu me dire le prix de l’inscription et si tu aurait la date pour 2014.vu que j’ai envoyer des mails a l’organisation mais toujour sans reponse. merci