Cette Porsche 964 Dakar de rallye raid était présente sur le Rallye Pionniers Classic 2024. C’est d’ailleurs sur cette compétition qu’elle a fait ses premiers tours de roues en prévision de participer au rallye Dakar Classic. Premier roulage, première prise en main pour son pilote Axel avec comme copilote, le préparateur (Nantes Prestige Autos) qui a conçu cette magnifique voiture. Je vous propose de la découvrir.
Un rêve, une Porsche pour le Dakar
Les Porsches ont eu leurs heures de gloire sur le Dakar dès 1984 avec 3 voitures engagées et la première place de René Metge. A l’époque, ce sont des 953 et par la suite apparaîtront les 959 Rothmans en 1985 sans trop de succès et en 1986 où elles remportent la victoire (encore René Metge).
Les Porsches en 1984 au Paris Dakar
- 176 – René Metge / Dominique Lemoyne – Porsche 911 type 953 – 1er
- 175 – Jacky Ickx / Claude Brasseur – Porsche 911 type 953 – 6ème
- 177 – Roland Kussmaul / Erich Lerner – Porsche 911 type 953 – 26ème
Les Porsches en 1986 au Paris Dakar
1 René Metge / Dominique Lemoyne |
2 Jacky Ickx / Claude Brasseur |
6 Roland Kussmaul / Wolf-Hendrik Unger |
40 ans plus tard, il existe toujours des passionnés de ces voitures mythiques. c’est le cas d’Axel. A 65 ans, après une carrière professionnelle bien remplie dans le secteur de la parfumerie surtout au moyen orient, Axel décide de réaliser ses rêves.
Avec un père passionné de mécanique, de kart, de courses de côte sur R8 Gordini et autres véhicules, il a été bercé par le bruit des moteurs et l’odeur des pneus et de l’essence. Quand il a 40 ans, à Dubaï, il commence le quad dans le désert avec un groupe d’amis. Les week-ends sont occupés à visiter et sillonner les plus belles dunes de la région. Mais en parallèle, il aime les Porsches et participe à des compétitions sur asphalte et fait partie du club local. Après son premier achat en 2005, il aura une 996 Turbo S, une 996 GT3, une 991 Targa avant de revenir vers des modèles plus anciens, 964 cabriolet et 911 2.0 l FIA. Malgré tout, le tout terrain et l’arrivée du Dakar Classic le titille fortement, il se renseigne, regarde ce qui a été fait et se dit qu’il pourrait peut être se faire construire une Porsche capable d’affronter les pistes. Loin de vouloir rivaliser avec les pointures du rallye raid, c’est motivé par la passion qu’il se lance ce défi. Attiré par le challenge et par le mythe ou plutôt les mythes, Dakar et Porsche, il se décide de contacter Jérémy Athimon de Nantes Prestige Autos qui a déjà réalisé des 959 de rallye.
Après plusieurs contacts et un aller retour en France pour le voir, le projet est lancé. Axel est, comme il me le dit : comme un gosse , il essaie une 959 et repart des étoiles plein les yeux et des rêves plein la tête. Parallèlement il contacte Ride & Roll, une entreprise qui gère les licences Gulf oil et leur présente le projet. Ils sont séduits par l’idée et vont donc participer.
Banco, la Porsche est lancée en Février 2024 avec comme dead line, la participation au Pionniers Classic, qui sera une bonne mise en jambe avant le Dakar. Comme Jeremy avait déjà acquis de l’expérience avec ses précédentes réalisations, il en tire profit pour cette nouvelle commande.
Suite au rallye qui vient de se clore, il y aura de futures améliorations mais la voiture est bien née. En prévision, un ski qui sera renforcé et deux trois bricoles, comme la mettre en surpression pour éviter les rentrées de poussière.
Porsche 964 4×4 préparation rallye raid
Jeremy Athimon, le préparateur de ce bel engin est à la base mécanicien moto. Mais il a toujours été passionné par les voitures anciennes. A 16 ans, il achète une Porsche 911 qui était stockée à l’arrêt dans une grange à proximité de chez lui. Il va passer des mois à la restaurer. Il est ensuite meilleur apprenti de France en 2007. Il s’occupe aussi d’un VW Combi. il jour il croise un client au garage moto où il travaille avec lequel il discute. Ce dernier a une magnifique collection d’anciennes et lui propose de l’aider à monter un garage en lui disant qu’il sera son premier client pour s’occuper de ses différentes belles anciennes. Depuis il s’est, au fil des ans, concentré sur les Porsches.
En parallèle, il a la passion du désert et du raid. Avec un ami, il fait régulièrement des balades en quad au Maroc. Il combine désert et mécanique avec une Baja bug VW avec laquelle il participe au VW Africa. Deux mois plus tard il est contacté par un autre coureur pour partir sur le Dakar Classic sur un Buggy Sunhill datant de la première édition du Paris Dakar.
Au retour, il décide de construire sa première Porsche de Rallye Raid, ce sera une 911. Il trouve une 3.2l pour 25 000 € qui sera pilotée par son camarade du buggy Sunhill et lui sera copilote. Ils finissent 9ème au général. LA Porsche sera revendue pour financer les futurs engins : 2 953 athmo et 2 959, les « Rothmaus » conçues comme les fameuses Rothmans de l’époque.
Ensuite viendra sa rencontre avec Axel et le début du projet de la 964 DAKAR GULF.
Il a pu visiter le musée Porsche et avoir Accès aux véhicules de l’époque pour s’en inspirer.
Après avoir trouvé une Porsche 964 carrera 4 de 1990 (qui avait participé au tour de Corse) direction l’atelier. Dans un premier temps on démonte tout, un arceau de sécurité spécifique à la Porsche et fait sur mesure sera installé en tenant compte de l’espace nécessaire pour loger la grosse roue de secours qui doit passer par la vitre arrière. Il est réalisé en acier 25cd4s de diamètre 50 et 40 mm. Des reprises de l’arceau jusqu’aux tètes amortisseurs avant et arrière sont faites.
Le coeur de notre Porsche est un 3.6 FLAT 6 retravaillé dans les ateliers de Nantes Prestige Autos, arbres à cames retaillés pour plus de couple, kit admission type fil chaud pour supprimer le débitmètre massique d’origine. Le double allumage est revisité, la courroie interne +25% plus large. Un échappement racing est monté, pour le volant moteur et l’embrayage, ils sont empruntés à une 997 GT3. La pompe à huile de boîte est connectée à un radiateur avec ventilateur situé dans aile arrière. Et pour le radiateur d’huile moteur, il est situé dans l’aileron arrière et dispose de deux ventilateurs.
La boîte à 5 rapports est prévue pour tirer court, pas besoin d’avoir 200km/h en vitesse de pointe, ici la V max tourne autour de 160 km/h. Le carter de boîte d’origine est conservé, absolument tout le reste est retravaillé par MARREL ET PELIN. La première super courte permet de rouler à 10 km/h à 1000 trs/min afin de faire face aux portions trialisantes et très rocheuses.
La carrosserie est ensuite préparée pour la rigidifier avec de nombreux renforts à des points stratégiques sur toute la partie structurelle de la caisse avec cependant la présence volontaire de points « faibles » pour faire fusible aux endroits voulus.
Un bon décapage par microbillage a été réalisé avant les travaux de soudure. Les passages de roues sont retravaillés pour avoir un meilleur braquage des grosses roues en 245/75r16. Il faudra ensuite former des ailes avant et arrière à la main ! Une semaine de travail par aile est nécessaire pour obtenir le galbe et la largeur de l’arche de roue désiré et pour obtenir le débattement maximal pour les amortisseurs pour éviter que cela ne frotte.
Une fois la caisse terminée, on l’envoie dans un bain cataphorèse pour prévenir la rouille dans le temps.
Ensuite on fera une peinture totale avec protection de type raptor sous la caisse.
Pour la suspension, c’est du côté de P2S que Jeremy s’est tourné. Le choix s’est porté sur 4 amortisseurs P2S 3 voies développés spécifiquement pour la voiture avec 250 mm de débattement. Pour information, la garde au sol sur la Porsche est de 40 cm.
Pour le freinage on reste sur de l’origine, on supprime juste l’ABS.
Un réservoir de 100 l est installé pour nourrir le moteur. Il est envisagé de pouvoir en mettre un de 120 l pour les longues spéciales.
Pour optimiser les roues de secours (une dans l’habitacle, l’autre sous le capot avant), les roues avant et arrière sont de même dimension.
Les jantes Raid qui rappellent les Fuchs des Porsches de l’époque reçoivent des BF Goodrich AT KO2.
Côté poids, on est sur du léger, donc du très performant avec un poids total pour la 964 DKR de 1300 kg avec le plein et les deux roues de secours.
Au final, il aura fallu pas mal d’huile de coude et près de 1000 heures de travail pour réaliser cette merveille.
Jeremy nous parle du rallye Pionniers Classic
Un super rallye, j’y allais détendu pour tester la caisse avant le Dakar, sans stress, mais on s’est très vite rendu compte que ça tabasse bien, c’est un vrai rallye, c’est difficile mais plaisant. En terme de difficulté c’est aussi dur qu’un Dakar Classic, donc c’était parfait pour jauger la voiture, et le finish dans le canyon et la page Blanche c’est mémorable ! Il n’y avait pas énormément de monde, mais ça mériterait d’avoir plus de concurrents d’autant plus que c’est fait sérieusement, l’orga, l’hélico, les médics, c’est super. C’est réellement une vraie course et ça n’a pas grand chose à envier au Dakar. On aimerait aussi aller sur l’Africaniste Race, et ce qu’on aime dans le rallye c’est partager une aventure humaine avec le pilote.
Axel nous a dit
J’avais la chance sur le rallye Pionniers Classic d’avoir à la fois un super copilote et le constructeur de la voiture en la personne de Jeremy. Il a réussi à nous dépanner quand nous avons eu un souci de tringlerie de boite alors qu’il n’avait qu’un couteau Leatherman !
C’était un plaisir de faire cette course avec une voiture un peu différente, une voiture de baroudeur. Sur place tous les gens sont sympas, organisateurs, pilotes, mécanos. Il y a une bonne ambiance, c’est sain et c’est très important d’être dans un bon élément. C’est détendu, mais on reste malgré tout dans la course, concentré. J’avais une super équipe avec un second mécano pour les révisions du soir, une vraie dreamcast team. Je ne suis pas un habitué de la rocaille mais plutôt du sable. Ici on a pas mal tapé, heureusement le ski est là. C’était un peu difficile mais c’est un plus en fait. J’ai beaucoup appris, comme par exemple lire la piste et être un peu comme un sniper avec l’oeil toujours aux aguets. Bien regarder devant soi, rester focus, savoir rouler à vue quand on en a besoin, lire les couleurs de la piste.
On est obligé d’acquérir une certaine technique pour éviter les dommages à la voiture. Elle est d’une robustesse incroyable, nous n’avons pas touché au moteur sauf les filtres. Il manquerait presque une sixième vitesse et quel couple. La puissance est suffisante avec ses 300 ch, on a l’impression de surfer quand c’est sablonneux, c’est hallucinant. J’ai apprécié les terrains variés, ça change de ce que je fais d’habitude dans le sable. Ici on a eu des oueds, des rocailles, du fesh fesh, c’est technique et plaisant à la fois. J’ai aussi beaucoup aimé le chef d’orchestre Philippe Rey, les équipes, les concurrents. Je remettrai le couvert volontiers d’autant plus que j’adore rencontrer des gens différents, de différentes nationalités, c’était bien ici de rencontrer des équipages venus de plusieurs pays. Je conseille aux pilotes européens fans de classiques de venir sur ce rallye.